Inauguration à Saint-Gaultier (36)

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Le samedi 17 décembre 2011, après celles du Poinçonnet (36), de Thénioux (18), de Neuillay-les-Bois (36), de Villedieu (36)… la commune de Saint-Gaultier (36) a décidé d’avoir, elle aussi, sa rue Mis et Thiennot, décidant ainsi d’afficher publiquement, solennellement, sa foi en leur innocence. Cet évènement a été suivi par un concert de la chanteuse « libertaire »  Elisabeth.


Discours de Léandre Boizeau

Quel est donc ce pays où la Justice se prête au jeu du règlement de
comptes entre copains et coquins embourbés dans la fange des affaires ?

Quel est donc ce pays où la Justice prononce des condamnations de plus
en plus lourdes pour les faibles en même temps que fleurissent les non lieux
pour les puissants à grands coups d’arguties juridiques ?
Quel est donc ce pays où l’on peut clamer son innocence pendant plus
de soixante ans sans que des juges ne s’en émeuvent, trop occupés
qu’ils sont à gérer une carrière réputée indépendante des pouvoirs
politiques ?
Quel est donc ce pays où l’on inaugure des rues portant le nom de gens condamnés par la Justice ?

Ce pays, c’est le nôtre. On n’ose dire celui des droits de l’homme tant ils
sont foulés au pied, repoussés d’un simple effet de manche ou ignorés
d’un désinvolte hochement de toque.
Face à ce mépris affiché par les hommes dits de loi, se lèvent parfois des citoyens qui se font une autre idée de la Justice. Nous sommes de ceux là.

C’est ce qui nous réunit ce soir à Saint-Gaultier.

Saint-Gaultier où le Conseil Municipal après ceux du Poinçonnet, de Thénioux, de Neuillay-les-Bois, de Villedieu…. a décidé d’afficher publiquement, solennellement, sa foi en l’innocence de Mis et Thiennot.

Que tous en soient vivement remerciés avec une mention particulière
pour Jean-Louis Simoulin, maire conseiller général, membre et militant
actif du Comité de soutien pour la révision du procès Mis et Thiennot
depuis plus de trente ans.

Jean-Louis a toujours été présent à nos côtés avec la tranquille
détermination qui est la sienne. Tranquille mais inaltérable leçon de
courage politique dont devraient s’inspirer tous les élus dignes de ce
nom.

Et puisque nous parlons de courage, comment ne pas évoquer ici, à Saint-Gaultier la ville où il est né, la mémoire de Jean-Paul Thibault, notre avocat trop tôt disparu. Il reste présent par la pensée et bien présent parmi nous au moment où nous nous apprêtons à déposer une sixième requête en révision devant la Cour de Cassation.
C’était son souhait le plus cher, nous allons le réaliser très prochainement avec l’aide de M° Mignard qui a repris le dossier en nous appuyant sur des faits incontestables : « les moyens violents utilisés aux fins d’obtenir les aveux ».

Cette action sur le plan juridique va se doubler dans les mois à venir
d’une nouvelle initiative du Comité en direction du législateur. Il est
désormais patent que la loi de juin 89 relative à la révision des procès et
qui doit beaucoup à l’affaire Mis et Thiennot est parfaitement inopérante. Cette loi prévoyait entre autres la mise en place d’une Commission de révision des condamnations pénales composée de cinq magistrats et chargée d’examiner les dossiers avant de les confier ou non au jugement de la Chambre criminelle de la Cour de Cassation. Cette commission qui dans l’esprit du législateur devait fonctionner comme une sorte de sas filtrant joue, en fait, le rôle de porte blindée.

Il n’y a pas eu plus de révisions de procès depuis juin 89 qu’il n’y en avait auparavant ce qui pourrait laisser croire que nous avons une justice qui ne se trompe jamais ! Là, est bien le problème. Il est lié pour une bonne part au fait que dans ces affaires de révision, la justice est à la foi juge et parti. C’est sur ce problème que nous inviterons le législateur à se pencher.
Fidèle à ses engagements, le Comité de Soutien garde donc le cap. Le combat n’est pas terminé. Des manifestations comme celle d’aujourd’hui sont un très précieux soutien à la lutte que nous menons pour la révision du procès Mis et Thiennot. Elles témoignent de la volonté de ce pays de mettre un terme à ce qui est vécu comme une humiliante injustice.

C’est la raison pour laquelle nous appelons d’autres communes à suivre cet exemple, Argenton sera la prochaine, d’autres ont déjà fait connaître leur décision de s’inscrire dans cette marche citoyenne vers une Justice débarrassée de tout esprit de classe, de caste et de toute tentation de repli corporatiste sur elle-même. Vers une justice à visage humain qui saurait reconnaître ses erreurs et qui, du même coup, se réconcilierait avec les citoyens de ce pays.

Notre combat n’est pas terminé, non. Nous le poursuivrons avec la même vigueur, la même détermination tant que nous n’aurons pas abouti. Loin de s’effriter, l’action que nous menons depuis plus de trente ans trouve sa justification dans les adhésions nouvelles que le Comité de Soutien enregistre jour après jour. Vous qui n’avez pas encore franchi le pas, rejoignez-nous !

Ce combat, c’est celui des hommes et des femmes de bonne volonté qui pensent que l’on n’est pas obligé de subir, que l’on peut, que l’on doit faire bouger les choses fussent-elles des institutions se voulant tutélaires.

Ce combat, c’est celui des hommes et des femmes de bonne volonté qui veulent prolonger celui de deux innocents injustement condamnés par une justice aveugle et sourde
« Jusqu’à la mort ! » disaient-ils, chacun à sa manière, véhémente pour Gaby, calme et réfléchie pour Raymond.

J’entends encore leur voix.
Jusqu’à la mort, ils se sont battus.
Au-delà de la mort, nous continuons et nous continuerons de nous battre.

Léandre Boizeau, président du comité de soutien Mis et Thiennot