Jean était le dernier des protagonistes. Il s’en est allé le 9 juin 2016, dans sa 91ème année, sans que justice ne lui ait jamais été rendue ! Dès que cela lui était possible, Jean était toujours présent lors des manifestations du Comité de soutien. Ci-dessous, lors de l’inauguration du Parc Mis et Thiennot à Le Blanc (36) en décembre 2012.

Les mots de Léandre lors des obsèques

Paisible !

C’est le mot qui vient spontanément en pensée quand on évoque l’homme qu’il était. Un homme fait pour vivre une vie toute simple au rythme de la nature, une vie de paysan tranquille, guettant les nuages et humant l’odeur de la terre avant que d’égrainer un épi au creux d’une seule main. Jean Blanchet était un homme paisible que rien ne prédisposait à vivre le drame qu’il a connu.

Cette plongée en enfer, il la doit d’abord à un concours de circonstances: une malheureuse partie de chasse qui aurait dû être une fête va se transformer en tragédie. Il la doit aussi et surtout à sa rencontre avec une équipe de tortionnaires débarqués à Mézières-en-Brenne : Jean ne comprit pas tout de suite ce que la PJ de Limoges attendait de lui: Quand on lui demanda de dire que la machine à écrire était un poêle à bois, il ne comprit pas. Son bon sens paysan ne pouvait pas accepter ça.

« Plus tard, j’ai compris !  » disait-il.

Plus tard, c’est quand les coups pleuvaient. Plus tard, c’est quand il entendait les autres hurler de terreur et de souffrance dans la nuit. Plus tard, c’est quand il comprit que personne n’aurait le courage de venir à leur secours.

Plus tard, enfin, c’est quand il signa des aveux.

« Je ne sais même plus ce que j’ai signé, je l’ai pas lu, c’est même pas ma signature, c’est un bout de machin que j’ai fait comme ça pour qu’ils arrêtent.

« Jean était un homme cassé, comme les sept autres, Raymond Mis, Gabriel Thiennot, Stanislas Mis, André Chichery, Émile et Gervais Thibault, Bernard Chauvet.

Brisés à jamais.

« Tu sais ben, pour la famille, on a quand même fait de la prison ! « disait-il souvent. Le combat pour la révision du procès Mis et Thiennot, Jean s’y était engagé immédiatement. Il a toujours répondu présent. En toute connaissance de cause et sans illusion. « Je crois ben que… on sera ben mort avant que ça s’ra fini tout ça. » Mais sans jamais baisser pavillon.

Jean, tu nous laisses à tous le souvenir d’un homme d’une gentillesse extrême, un homme que la vie avait cassé mais qui restait plein d’humanité et de dignité.

Tu nous quittes avant que nous n’ayons obtenu la révision du procès Mis et Thiennot.

Honte à ceux qui laissent partir des gens comme toi sans leur rendre justice !

Mais notre combat continue, pour toi, et pour tes sept malheureux compagnons.

Qu’on leur rende enfin justice !