Déols, novembre 2013 : sous le signe de Mis & Thiennot…

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Pas moins de quatre manifestations avaient lieu ce mois de novembre 2013 sur la commune de Déols :

  • du 29 octobre au 9 novembre : l’exposition sur l’affaire à la bibliothèque de Déols,
  • le 22 novembre:projection suivi d’un débat autour du film de Dominique Adt « Présumés coupables »,
  • le 26 novembre à 16h30 : conférence de presse en présence de M° Mignard et M° Blard,
  • le 26 novembre à 18h30 : inauguration d’une rue Mis et Thiennot.

La conférence

L’inauguration

Autant dire que Déols – la commune où a vécu Gabriel Thiennot une bonne partie de son existence et où sa veuve, Jeannine Thiennot, et ses fils vivent encore actuellement – affiche haut et fort son refus et indignation devant cette profonde injustice et manifeste clairement son engagement et soutien auprès du comité M & T. Puisse cela donner exemple et encourager d’autres communes à venir nous rejoindre… 

Photos réalisées par Christian Pineau, membre administrateur du Comité de Soutien


Discours d’Helga Pottier

La ville de Déols est la douzième commune à donner le nom de Mis et Thiennot à un lieu public.
Les élus de ces communes ont le courage d’exprimer haut et fort leur désaccord avec les décisions de la justice concernant l’affaire Mis et Thiennot. Ils montrent que la population du Berry sait depuis longtemps que Raymond Mis, Gabriel Thiennot, ainsi que leurs camarades d’infortune Émile Thibault, Gervais Thibault, Stanislas Mis, André Chichery, Bernard Chauvet et Jean Blanchet sont innocents.

Ils étaient très jeunes quand leur vie a basculé un jour d’hiver 1946. Accusés du meurtre du garde-chasse Louis Boistard, ils ont subi des interrogatoires très musclés pendant huit interminables jours et nuits de garde-à-vue par des enquêteurs qui étaient coutumiers de méthodes d’interrogatoires violentes, héritées de l’occupation.

La torture ne s’oublie pas. Elle est présente tous les jours, assombrit les événements de la vie et hante les nuits avec de terribles cauchemars.
Raymond Mis, Gabriel Thiennot et leurs camarades ont dû vivre avec cette souffrance. Mais aussi avec la souffrance d’avoir été injustement condamnés à trois reprises en Cour d’Assises pour un meurtre qu’ils n’ont pas pu commettre. D’avoir été emprisonnés à tort pendant sept ans, six mois et quatorze jours. Toute leur vie, ils ont clamé leur innocence et se sont battus pour que la justice la leur reconnaisse.

Monsieur le Maire, nous vous remercions très chaleureusement, vous ainsi que votre conseil municipal, d’honorer ces victimes d’une véritable machination judiciaire. Vous avez le courage de désavouer une décision de la justice, décision par cinq fois réitérée. Vous avez le courage d’afficher clairement votre volonté de ne pas accepter une justice qui a du mal à admettre qu’elle s’est trompée, une justice qui ne veut pas reconnaître que des aveux obtenus sous la torture sont nuls et non avenus.

Un lieu public qui s’appelle Mis et Thiennot est le signe du refus d’une injustice évidente. Une rue Mis et Thiennot, ici à Déols, revêt de plus un caractère spécial : Gabriel Thiennot y a vécu de 1979 jusqu’à sa mort en 2003.
D’abord rue de Marban, à quelques pas d’ici, au moment même où Léandre Boizeau écrit son livre «Ils sont innocents», livre qui déclenche le rebondissement de l’affaire, la création du Comité de Soutien et les différentes requêtes en révision qui s’ensuivent. Ensuite avenue des Sublines où sa femme Jeannine vit toujours, près de ses enfants.

Toutes ces années de lutte, Gabriel les a vécues à Déols, sa ville.
C’est depuis Déols que le grand public l’a connu, lui qui n’a cessé de crier son innocence avec ses tripes lorsde réunions, de conférences, de manifestations, d’émissions de radio et de télévision.
Thiennot, «l’homme qui hurlait d’innocence» comme le dit si bien le titre d’un autre livre de Léandre Boizeau, n’a pas hésité à interpeller les juges qui l’ont méprisé et de leur prédire que leur nom serait oublié depuis longtemps alors que le sien continuerait à exister, comme le symbole d’une justice aveugle et indigne. Et il avait raison : jamais il n’aurait imaginé qu’un jour son nom figurerait sur des plaques de rue.
Comme une preuve indélébile de son innocence reconnue par tous !

Nous continuons le combat de Gabriel, de Raymond et de leurs camarades. Maître Jean-Pierre Mignard, notre avocat, a déposé une 6e requête en révision. Il met les juges devant leurs responsabilités : depuis le rapport de 1954, il est reconnu que les aveux ont été obtenus sous la torture. Les juges se doivent donc d’effacer ces aveux du dossier.

Pourquoi se battre 67 ans après les faits ? Gabriel Thiennot a eu la réponse un jour sur un plateau télé : «Pour l’honneur» avait-il répondu au journaliste qui lui avait posé la question. Pour l’honneur de Mis et Thiennot, mais aussi pour l’honneur de la justice car elles honorerait à reconnaître son erreur. Cela correspondrait enfin à l’idée que nous nous faisons de la Justice (avec un grand J). Nous ne pouvons plus accepter une justice qui se cache derrière la (soi-disant) «vérité judiciaire». Nous ne pouvons plus accepter une justice qui ferme les yeux sur ses erreurs du passé.
Parce que nous avons tous besoin d’une justice respectueuse. Et parce que nous sommes tous des enfants de Mis et Thiennot.

Helga Pottier, présidente du comité de Soutien pour la Révision du Procès Mis et Thiennot